mercredi 13 juillet 2016

La justice de l'ancillaire, Ann Leckie

Hey.
Un petit mot rapide pour parler de ce livre sur lequel les avis semblent diverger, mais qui m'a plutôt enthousiasmé.

Donc, La Justice de l'ancillaire, traduit de Ancillary Justice, premier roman d'Ann Leckie, qui remercie dans son bouquin son club d'écriture, et partie inaugurale d'une trilogie dont le tome 2 vient juste de sortir (mais là, je suis noyée sous les bouquins, je me le garde donc comme plaisir coupable pour une prochaine fois).



Ce roman a reçu un accueil enthousiaste, dont le bandeau et la quatrième de couverture de l'édition J'ai Lu Millénaire porte la trace : une dizaine de mentions de prix parmi les plus prestigieux.
Pour autant, lorsqu'ayant loupé 3-4 stations de métro, prolongé une veillée de manière déraisonnable et jailli dans ma librairie préférée en le brandissant comme une sorcière son balai, le trio de spécialistes de la SF réuni à ce moment là devant le café m'a dit en gros : "Ah oui ? Tu as aimé ? Parce que bof-bof."
Bof-bof signifiant, parce que j'ai demandé : rien de nouveau sous le soleil, histoire ni originale ni intéressante, très longue première moitié du roman, personnages pas spécifiquement attachants.
Et puis j'ai lu d'autres critiques plutôt cools qui disaient "moui, ça peut plaire aux plus jeunes."

Well, il se trouve que j'ai vraiment aimé ma lecture, alors je vais essayer d'expliquer ce qui moi, m'a accroché : tout d'abord, il y a ce personnage principal incroyable (et effectivement peut-être pas follement chaleureux) qui est une intelligence artificielle de vaisseau spacial prise au piège dans un corps humain. Et qui regarde donc le monde avec une distance froide fascinante. Dès la première page, elle découvre une ancienne co-équipière dans une situation critique, et résoud de la sauver, pour des raisons particulièrement mystérieuses. Ce second personnage est délicieusement odieux, et c'est aussi lui qui va le plus évoluer pendant l'aventure, apportant progressivement une touche plus humaine (mais presque décevante, je l'aimais tellement snob, drogué et revenu de tout). Quoiqu'on ne puisse pas dire que notre IA reste complètement impassible, mais elle l'est pendant la majeure partie du récit, se révélant subtilement.
Comme les romans le font beaucoup, la narration alterne différentes périodes de temps: lorsque notre IA était encore un vaisseau, ses missions diplomatiques et ses relations avec son Capitaine préféré, et ses aventures actuelles. Bien sûr, et c'est pour moi l'une des meilleures pages du roman, Ann Leckie s'est réservée le plaisir de nous raconter la séparation de l'IA (une même scène d'action qui saute du vaisseau à la vingtaine de corps que son intelligence occupe, avec fluidité jusqu'à la rupture et l'isolement de notre héros). C'est, il me semble du très beau travail, et Ann Leckie est également plutôt douée pour le suspens (des scènes d'espionnage ou de négotiation très prenantes) et l'émotion.

Et surtout, il y a aussi ce jeu sur le genre qui m'a épatée (et je sais que c'est loin d'être la seule à jouer cette carte-là, et j'espère vite les découvrir) :  notre IA le dit dès le début, dans sa culture, il n'y a pas de différence culturelle entre les sexes, et le neutre est féminin. On dit par défaut "Une homme, Une capitaine, une vaisseau." L'ancienne partenaire récupérée à la page 1 est donc d'un genre indéterminée au début, à moins que le lecteur, comme moi, n'assume qu'elle est féminine pour finir par hésiter. Les relations entre personnages sont aussi habitées par cette incertitude, que l'on trouve troublante au début, pour l'accepter parfaitement en cours de roman.

Alors oui, c'est peut-être un peu facile par moment, comme un fast-food quand on rentre très tard chez soi et qu'on a pas envie de faire d'efforts. Mais le plaisir de lecture est bien présent, et pour peu qu'il soit disponible à la bibliothèque, ça vaut le coup d'essayer.

(Et ne me jetez pas trop de pierres, je vais lire du Baxter, c'est en cours...)
 

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