jeudi 20 septembre 2018

Way inn, Will Wiles

La rentrée constitue l'une des périodes où la dissonance entre le temps apaisé des vacances et les servitudes du monde contemporain est la plus forte.
C'est donc le moment idéal pour lire le roman de Will Wiles.


J'en veux pour preuve : Neil Double, le héros, occupe l'étonnante profession de double de congrès pour cadre. En résumé, les congrès sont une plaie auxquels les cadres vont munis de leurs plus beaux costumes, la valise remplie de cartes de visites, pour sociabiliser avec d'autres cadres dans un but de réseautage professionnel, et prendre des notes qui justifieront que leur hiérarchie leur ait offert ledit congrès.

Ceci, nous dit Neil, est fortement ennuyeux pour tout le monde. Sauf pour lui, qui adore l'atmosphère hygiéniste et anonyme des chambres d'hôtels, et a transformé ses visites aux conférences en véritables promenades psychogéographiques (si vous faites appel à ses services, il vous ramènera également badges, stylos et mugs promotionnels pour attester de votre présence).
La profession disruptive de Neil est donc appelée à un bel avenir.
Jusqu'au jour où un incident le contraint à fréquenter de plus près le milieu aride des couloirs de chaînes d'hôtels, leurs moquettes interchangeables et leurs peintures abstraites.
Comme le sommeil de la raison engendre des monstres, nous dit Goya, Neil va découvrir que l'utilitarisme le plus propret constitue le nid idéal pour l'horreur débridée, période Jack-Halloran-écrit-dans-sa chambre-de-l'Overlook.

Will Wiles écrit un roman réjouissant et hyper contemporain, dont l'écriture clinique et détachée permet la distance nécessaire pour parodier les rites de l'entreprise.
Les amateurs du Ballard de Crash et de I.G.H. trouveront du plaisir à fréquenter les couloirs de  Way Inn, et la deuxième partie du roman devrait également satisfaire les nostalgiques du King horrifique des années 70-80.
On passe un moment délicieusement acide avec Way Inn, qui constitue un honorable roman d'horreur, comme cela fait bien longtemps qu'on en avait pas lu.


Way Inn, Will Wiles, traduit par Marie Surgers, La Volte, septembre 2018.

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