lundi 12 septembre 2016

Le livre sacré du loup-garou, Viktor Pelevine

Viktor Pelevine écrit des romans plus ou moins fantastiques, et, comme de nos jours, les frontières entre littérature blanche, littérature de l'imaginaire, autres genres, et tutti sont aléatoires, poreuses, et/ou inexplicables, le livre dont il va être question a été publié chez Denoël & d'ailleurs en 2009.



Dans Le livre sacré du loup-garou, notre narratrice, la brillante A Huli (dont on apprend que le nom, prononcé en russe, constitue une grossièreté), est une renarde-garou de 1200 ans qui se prostitue auprès des nouveaux riches pour survivre*.
Son état de renarde lui permet de projeter à ses clients leurs fantasmes les plus secrets, et elle vit en spectatrice désabusée de la vie des humains depuis un long moment, lorsqu'elle rencontre un autre loup-garou.

A Huli est indépendante, sarcastique, aventurière, c'est à la fois un beau personnage et un paravent idéal pour Victor Pelevine, qui se moque ici de la société Russe contemporaine -et de la société actuelle en général, d'ailleurs. On y trouve les fameuses formules brillantes qui ont fait son succès, et qui m'évoquent par moment les envolées cyniques d'Irvine Welsh ou de Chuck Pahlaniuk. La traduction de Galia Ackerman et Pierre Lorrain n'est pas pour rien dans cette réussite, car je me doute que rendre la langue bien particulière que Pelevine prête à A Huli n'est pas chose facile.

Alors, disais-je, elle rencontre un loup-garou. S'ensuit une histoire d'amour tout à fait distrayante, les deux étant des lettrés qui se jettent à la tête des références culturelles de toutes époques et tous niveaux visant à réfléchir à la société dans laquelle ils vivent (des jeux vidéos, des contes, les grands classiques russes et les chefs d'oeuvres du cinéma international : tout y passe). Et A Huli, qui aime analyser ses propres émotions, fait par ailleurs une amusante présentation des sentiments qu'elle éprouve, toute surprise de se retrouver touchée par le sentiment amoureux.

Dans le roman post-moderne (et c'est ce qu'écrit Victor Pelevine), l'action est surtout prétexte à autre chose. Aussi, pas d'étonnement devant le côté forcé, pleinement satirique, des événements qui se produisent, le coeur de l'action étant plutôt les idées propagées par Adèle et Sacha (les petits noms amoureux de nos deux héros). Dont on se délecte réellement, car, comme je l'ai déjà écrit, le roman exsude la culture bien utilisée, drôle, intelligente, et qui nous permet de nous faire une idée de l'état d'esprit de la Russie actuelle.

Cependant, la fin du roman (50, 70 pages) est une longue communication sur la mystique et l'illusion, dont une partie est artificiellement traitée en dialogue dans l'espoir de la rendre plus digeste, et que j'ai eu du mal à apprécier. Je crois qu'elle a beaucoup à voir avec le rôle que Pelevine prête à ses personnages : Sacha, en tant qu'incarnation du Russe 19-20e siècle peut continuer grâce à ses illusions romantiques et idéalistes, quand il faut un autre remède aux réflexions réalistes et désenchantées d'A Huli, âme résolument postmoderne (et il semble évident que Pelevine partage plutôt le point de vue de la renarde).

Heureusement, juste avant, on s'amuse beaucoup, il y a des pages de citations à recopier dans un coin de votre zibaldone personnel.
La lecture de Pelevine est absolument mémorable.


Le livre sacré du loup-garou, Viktor Pelevine, traduit par Galia Ackermann et Pierre Lorrain. Denoël, 2009.

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*Ce résumé me met positivement en joie.

lundi 5 septembre 2016

Lumikko, Pasi Ilmari Jääskeläinen

Alors que le Finnish Weird connaît chez nous une célébrité grandissante, j'ai profité de mon été pour lire Lumikko, livre dont le titre original est "La société littéraire du Dos-de-Lapin".

Cette belle couverture permettra d'identifier sans se tromper la maison d'édition de l'Ogre, aux publications audacieuses.



Dès les premières lignes, le lecteur est happé à la suite de la professeure de français Ella Milana, qui constate qu'une maladie touche les livres de son petit village, modifiant l'histoire qu'ils racontent. Le virus se propage jusque dans la bibliothèque locale, et semble avoir des liens avec la mystérieuse société littéraire du coin.
Fondée une trentaine d'années auparavant autour de la célèbre romancière pour enfants Laura Lumikko, ladite société avait pour objectif de repérer dix enfants prometteurs et d'en faire des auteurs importants. C'est chose faite, pour neuf d'entre eux, mais le dixième n'a jamais été identifié, jusqu'à ce que l'honneur n'échoie sur Ella.
Tout en poursuivant son enquête, elle va découvrir l'éducation qu'ont reçue ces auteurs, tous se livrant pour trouver de la matière littéraire à d'étranges pratiques.

Lumikko est inclassable et joue sur le décalage permanent : il associe à part égales une réalité banale avec un fantastique au bord du nonsense britannique. Bien que d'origine finlandaise, dans ce roman, le bizarre est reçu par les personnages avec un flegme qui évoque fortement Lewis Carroll. Toute la mécanisme du récit semble reposer sur une enquête quasi-policière, qui prend son temps, lézarde en route, visite d'autres genres littéraires et ne répond pas tout à fait à la question centrale : qui*qu'*est vraiment Laura Lumikko, aux livres pour enfants qui hésitent entre contes traditionnels et imaginaire Burtonien ? Aux étonnantes pratiques éducatives ?
Les personnages qui marivaudent dans cette aventure sont plutôt réussis et ont ce qu'il faut de défauts pour être touchants (sauf la bibliothécaire-auteur jeunesse, qui me semble-t-il, est surtout écrite dans un but précis*).
Le grand sujet du roman est l'amour des livres et de l'écriture, et on le déguste à toute heure et sur toutes les pages : nos personnages sont abonnés à des revues littéraires, traînent dans des bibliothèques publiques ou personnelles, se racontent des histoires, ont des tables dédiées dans les cafés avec leurs livres dessus).
On lit donc un étrange beau moment, peuplé de lettrés charmants et subtilement inquiétants, dans un village qui a ses zones d'ombres.

Si l'on est patient et plutôt anglophile, que l'on a une grande après-midi pluvieuse devant soi, Lumikko promet un excellent moment.

Lumikko, Pasi Ilmari Jääskeläinen, éditions de l'ogre, 2016. 406 p., 25 €.

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* Cependant, je ne suis pas complétement impartiale avec les personnages de bibliothécaires...

mercredi 31 août 2016

Choses vues et lues, août 2016

Bronzage et Bouquins.

Paul Klee au Centre Pompidou
Où on a pu découvrir que son travail n'a que très peu à voir avec celui de Kandinsky.
Paul Klee, selon ce qu'en montrait cette exposition rétrospective, était avant tout un innovateur passionné, qui, des débuts caricaturistes de sa carrière à la fin plus abstraite, n'aura jamais cessé de tester de nouvelles pratiques.
Paul Klee, depuis L'art invisible, autre lecture de cet été, où il est cité par Scott McCloud, nous dit ceci :
"L'art ne reproduit pas le visible ; il rend visible."
Ce qui rend intelligible l'art moderne, en quelque sorte.

Only lovers left alive, Jim Jarmush, 2014
Que peuvent bien faire ces grands mythes romantiques que sont les vampires dans la société moderne ? Déprimer parce que le monde n'est décidément plus aussi poétique qu'avant. Déprimer d'autant plus sec que leur nourriture de référence est trafiquée aux hormones et pleine de maladies exotiques.
Un grand film mélancolique, qui correspond parfaitement à la créature dépeinte : les vrais bons films de vampires se passent souvent à des époques révolues et élégantes. Lorsqu'il est aux prises avec la modernité, le vampire se trouve mal, et cette dépression snob lui va particulièrement bien.
Le spleen vampirique, quoi.
Bonus : je suis absolument fan de Tilda Swinton.

Infamous, Douglas McGrath, 2006
Un film réussi/raté : tout ce que Capote raconte, c'est à dire la rédaction d' In cold Blood, le film avec Seymour Hoffman le raconte bien mieux. Par contre, la représentation du milieu mondain est imparable dans Infamous, et le personnage de Capote, cet étrange petit homme, avec son élégance hors de propos, ses poses affectées et sa voix de crécelle sont mieux rendues dans Infamous. On comprend mieux ce personnage à fleur de peau, facile à détester autant qu'à aimer, exigeant, fragile, insupportable.

Escape from New York, John Carpenter, 1981
Un bon vrai film de science fiction, héroïque à fond, esthétique à fond : dans ce New York du futur devenu une prison, un héros doit sauver le président. Snake Plissken, mis en valeur en permanence, autant par les jeux de lumière et de caméra que par les costumes, y est forcément un héros mémorable.
Le do-it-yourself inventif des prisonniers de New York m'a beaucoup réjouie, et  je suis encore marquée par une scène d'hélico très 80's où le visage de Kurt Russel se détache de la pénombre grâce à des néons verts et fushia. Moment parfait.

Le mouvement situationniste, une histoire intellectuelle. Patrick Marcolini, 2013.
Un moment, dans sa vie, on croise forcément "les situs". Certains ont la chance de les découvrir tous jeunes, et d'être abreuvés de ce que leurs réfléxions ont de joyeux et libérateur. D'autres passent à côté, ou n'en saisissent que des bribes (la psychogéographie, concept très littératures de l'imaginaire). Ce livre, issu de la thèse de Patrick Marcolini, offre une présentation approfondie du mouvement. On lui reprochera peut-être (ou l'on louera) son exigence. La petite lectrice que je suis a pris pour sa part trois gros mois pour le lire, en prenant note de ses milles notes bibliographiques, en allant se renseigner sur les personnages cités... Ce Leviathan du situationnisme est remarquable mais peut-être à réserver aux lecteurs motivés. Pour ma part, devant la vive intelligence des réflexions, j'ai plus d'une fois souri dans le métro.

Te Quiero, J. P. Zooey, 2016
Le post-modernisme peut aussi être romantique, et se moquer de lui-même. C'est le cas dans ce roman charmant dans lequel Bonnie et Clyde, deux gentils jeunes hipsters de Buenos Aires, vivent une histoire d'amour joueuse et mélancolique, tout en étant les jouets complices de la société dans laquelle ils vivent. Une joyeuse passivité qui communique à coup de smartphone, et qui réussit cependant à provoquer l'enthousiasme. Et c'est court et léger, aucune raison de s'en priver.

La main gauche de la nuit, Ursula Le Guin, 1969
Il était temps de lire ce classique intemporel, qui bien plus que la remise en question du genre, dont il est devenu le symbole, est avant tout un roman de l'altérité (comme toute bonne science-fiction, oui, oui). Les peuples créés par Le Guin sont fascinants de réalisme, et la plongée aussi ethnographique que digne d'un bon roman d'aventures du narrateur envoyé de l'Ekumen, est captivante.
Il va falloir lire le reste.

L'amazone et la cuisinière, Alain Testart, 2014
Où l'ethnologue Alain Testart confronte l'histoire des sociétés pour essayer de comprendre la division sexuelle des tâches. Le court ouvrage est captivant, facile à lire, et on en retire deux théories : 1/les activités interdites aux femmes ont un lien non pas avec leur capacité physique mais avec le bouleversement qui a lieu dans leur corps une fois par mois 2/la captation des activités par l'homme se fait souvent dans un but de prise de pouvoir, lors d'une évolution technologique.
Mais pour plus de détails, il vaut mieux le lire directement, bien sûr.

L'art invisible, Scott Mc Cloud, 1993
Cette bande dessinée est très riche si on aime ce support. Scott McCloud joue les Karim Debbache avant la lettre, nous raconte l'histoire de son médium et en livre quelques clés d'analyse. Au passage, on gagne aussi quelques compétence en économie et histoire de l'art. Un seul regret : que ce soit si Américain et que l'équivalent n'existe pas pour l'Europe, cas très différent.

Après la Chute, Nancy Kress, 2014
Un récit pré et post-apocalyptique qui entremêle deux narrations, avec des voyages dans le temps, deux personnages de femme forte, des adolescents particulièrement bien décrits et un récit très (trop) rapide.  Pas déplaisant.

Et alors, un artiste ?

L'illustrateur Brésilien Butcher Billy réalise de cool cut-ups de comics et de culture pop, il y a de la couleur qui éclate partout, et si tout n'est pas de la même qualité, ça fait quand même plaisir à voir.
Un exemple qui me met de bonne humeur quand j'y pense juste là.

PS : le site RedBubble en vend des versions sur mini-jupe.Oui.

samedi 13 août 2016

Ascension, science fiction inaboutie

Parlons aujourd'hui de la mini-série Ascension, initialement diffusée en 2014 sur Syfy, et en 2016 sur 6Ter.


Le premier épisode est enthousiasmant : alors que les hommes continuent leur quotidien sur terre, dans le plus grand secret, depuis les années 50, un vaisseau spatial "générationnel" a été lancé dans l'espace. Pleuplé de scientifiques, qui vieilliront, auront des enfants, mourront, et dont les enfants atteindront leur destination dans 100 ans : une planète isolée à tenter de peupler.
A l'intérieur du vaisseau, on vit comme sous Kennedy, dans une apparente bonhommie, avec un fort sens du devoir. Cependant, le meurtre d'une jeune femme, alors que s'approche le point du voyage où le demi-tour n'est plus possible, vient bouleverser les esprits.
Sur terre, Harris Enzmann, dont le père a fondé la mission, aidé d'une myriade de caméras, continue discrètement de tirer les ficelles au sein du vaisseau.

Voilà, schématiquement, ce qui se dit dans ce premier épisode. Les enjeux sont bien présentés, on pointe les problèmes de la société des années cinquante -sexisme, racisme, mépris de classe des dirigeants du vaisseau pour les techniciens des ponts inférieurs- à travers différents personnages.
La série joue sur plusieurs aspects, ce côté vintage déjà-vu, l'excitation de ce départ secret (le vaisseau arrivera-t-il à destination malgré les nombreux incidents ?), l'enquête policière qui commence, un soupçon de fantastique à travers le personnage à peine esquissé d'une petite fille qui sait trop de choses...
Beaucoup de pistes, donc, et de pistes intéressantes.

L'affaire coule dès la fin de l'épisode 2, où un très gros retournement de situation nous est révélé. Retournement qui annule toute une part de l'intérêt du spectateur, en supprimant l'un des éléments qui permettait de faire avancer la narration. Traiter toutes les histoires potentielles esquissées par les premiers épisodes était bien sûr impossible. Mais il me semble que Philip Levens, le showrunner et scénariste a fait un choix malheureux en tranchant dans le vif ce qui constituait justement sa trame principale, en nous laissant avec les multiples histoires secondaires, qu'il n'aura pas le temps de développer dignement, la série étant annulée par la chaîne au bout de la saison 1. Aurait-il pu rebondir sans cette annulation ? Peut-être, la trame laisse le champ libre à bien d'autres possibilités du scénario.
Cela ne s'est pas produit, et au bout du deuxième épisode, la série atteint un creux dont elle ne se remettra jamais vraiment, contrainte à un mixage frustrant et trop rapide des différentes histoires, alors que des personnages extérieurs continuent de s'ajouter au récit, venant brouiller un message qui n'était déjà plus très clair.

Pour 6 épisodes, on peut satisfaire sa curiosité.

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Enfin, voilà ce que'on peut en dire sans dévoiler l'intrigue complétement.




L'analyse du twist raté est réjouissante.




Alors.
Attention.
Spoil.
Si personne n'avait deviné.





A la fin de l'épisode deux, le spectateur découvre que le vaisseau spatial n'est jamais parti, et qu'il est fermé dans un très grand laboratoire, sur terre. Les chercheurs embarqués qui croient travailler à résoudre leurs problèmes de survie une fois l'atterrissage effectué, travaillent en fait à l'évolution technique sur terre, et nous dit-on, cette stratégie s'avère très rentable.
C'est là qu'est tout le problème de la narration : que faire quand les héros ne sont plus des héros ?
Car soudain, nos vaillants astronautes passent du statut de pionniers de l'aventure spatiale à rats de laboratoire, et ne vont plus nulle part, alors que l'essentiel des trames narratives intéressantes se situaient à bord du vaisseau.
Au début de l'épisode trois, on aurait pu imaginer que "l'extérieur" prenne la direction narrative, puisqu'en réalité c'est là que se situe le moteur de l'histoire. On aurait pu découvrir des personnages forts, traversés par le doute ou l'avidité, par exemple, liés à l'opération et au secret depuis des années. On aurait pu découvrir les rouages de cette gigantesque machinerie, et comment elle remplit ses objectifs, et à ce stade maintes scènes aurait été imaginables : découverte du stratagème, actions des agents de l'extérieur pour "adoucir" la vie sur le vaisseau, anciens habitants évacués qui veulent sauver les reclus... Mais pour cela, il aurait fallu traiter la surface de la terre et ses personnages comme les éléments principaux (et non plus le vaisseau, qui serait devenu plus secondaire, à moins qu'un de ses habitants ne se doute de la vérité ou n'émerge à l'extérieur, gagnant donc de l'influence sur le récit principal).
Mais cela ne s'est pas produit ainsi : les personnages de l'extérieur sont caricaturaux, peu fouillés, peu nombreux. Les péripéties (rebellion, sortie d'un participant, changement de direction à la tête du projet, histoire d'amour dans un seul sens...) sont esquissées, résolues à la va-vite et s'enchaînent sans avoir de sens.
Il me semble opportun d'invoquer ici l'autre grande série voyeuriste de l'an dernier, Unreal, où l'on suit les aventures entremélées d'une téléréalité romantique et de l'équipe de tournage qui la filme et manipule ses participants. La première saison réussit avec brio les bascules entre les deux narrations, et introduit le récit enchâssé (la téléralité produite) avec un recul plein de cynisme. Les personnages forts sont répartis des deux côtés de la narration, et leur collision dans la réalité est toujours utilisée à dessein.
On imagine avec l'exemple d'Unreal ce qu'Ascension aurait pu donner à voir, si elle avait su quoi faire de son double récit.
Au lieu de quoi, Philip Levens se tire une balle dans le pied en choisissant de traiter ses passages sur le vaisseau avec le plus grand sérieux, alors que plus aucune décision n'est finalement vitale (le spectateur le sait, si vraiment tout va mal, ils peuvent sortir; ce qui équivaut à la tension dramatique de Huis-clos de Sartre si les trois personnages avaient à chaque instant la liberté de quitter l'Enfer où ils subissent leur compagnie mutuelle : ouvrez la porte d'un huis clos et il n'y a plus d'histoire).
Pourquoi ce choix ? Peut-être parce qu'il fait une série de science-fiction. Et, la science fiction, c'est plein de vaisseaux spatiaux, c'est ce qu'on lui a commandé.
Il remplit donc son office, avec un twist audacieux, mais sans la réflexion nécessaire sur ce que cet artifice sous-entend, offrant finalement un produit sans tête, aussi inabouti que le projet Orion dont il s'inspire.

Ce qui fait donc d'Ascension un échec exemplaire.

mercredi 3 août 2016

Du girly dans l'art, Elizabeth Peyton et l'aliénation féminine

Elisabeth Peyton est-elle la Marie Laurencin des 90's ? Que dire du "girl stuff dans l'art"?

Elisabeth Peyton est cette peintre des années 90 qui fait essentiellement de jolis portraits de beaux jeune hommes. On peut voir une de ses toiles au Centre Pompidou, Prince Harry and Prince William (1999).

Mrs. Peyton me serait probablement restée inconnue, si, en me promenant dans la librairie du Centre Pompidou, je n'avais pas été frappée par la couverture d'une monographie qui lui est consacrée. Ce qui a accroché mon oeil, c'est le duo de couleurs bistres et bleutées qui constituait le portrait de la couverture, et un sourcil juste lancé d'un coup de pinceau, à la couleur très délayée.
Quand on erre dans ladite librairie, des centaines de livres se conccurencent pour attirer ainsi notre attention, et dans ce genre de cas, je prends un crayon, je note le nom de l'artiste, et je rentre chez moi me renseigner un peu.




Il se trouve qu'Elisabeth Peyton, bien que très bien côtée, avec cette démesure financière actuelle dans l'art, qui fait qu'une cote ne veut pas dire grand-chose, a plutôt mauvaise presse.
On trouve le site du Centre Pompidou une présentation sévère de son oeuvre, dont les arguments sont globalement les suivants :
- Elisabeth Peyton est mauvaise artiste : mauvaise dessinatrice (et seuls ses 20 ans de pratique la sauvent), mauvaise "penseuse" de l'art (dans l'audio du Centre Pompidou, l'intervenante insiste sur son incapacité à se relier à un courant et à son manque d'aisance littéraire et culturelle).
- malgré l'intérêt pictural de ses toiles ("elles font beaucoup d'effet", dit-on), elle se contente de répéter les couvertures de la presse people, offrant une médiatisation à ceux qui l'ont déjà. C'est si ininteressant qu'à l'apogée de sa gloire, on la voyait partout dans les magazines de mode (et on sait quoi penser desdits).
- ses sujets sont tous de beaux jeunes hommes célèbres, androgynes et longilignes, qui font partie de son cercle intime et dont beaucoup ont été ses amants (et cela la disqualifie en tant qu'artiste : elle utilise ses peintures pour se positionner face au public, et faire une sorte de "fan art", béat d'admiration devant la beauté)
Et, quoique je puisse comprendre une bonne part de cette critique, elle me pose aussi plein de questions (mais allez donc, si cela vous intéresse, écouter ce très intéressant audio, qui parle d'hystérie et la compare à Christine Angot et Sophie Calle).

La peinture de Peyton est-elle très audacieuse ou dérangeante ? Certes pas (on pourra aller la rapporter aux oeuvres de Marlene Dumas ou de Françoise Petrovitch), elle est même tout à fait plaisante. Si on la compare à la peinture contemporaine, avec toutes les références à l'art conceptuel que cela implique, on se trouve très ennuyé. Parce que c'est joli, conventionnel, tout ce que l'art contemporain n'est pas, car il est occupé à brillament analyser et disséquer ce que le monde nous offre. Peut-être que c'est de l'illustration de mode surestimée, mais alors où est l'art ?
Il est en effet très vrai que la peinture d'Elizabeth Peyton peut être qualifiée de "girl art". Il me semble que c'est même là une des clés de lecture de son oeuvre (et que l'on est pas obligé d'y ajouter des qualifiquatifs dénigratoires).
Si, faisant abstraction du courant de l'art actuel, on se rappelle la peinture de société des XVIIIe et XIXe siècle, le travail de l'artiste se trouve plus compréhensible. On peignait alors des personnes de la bonne société, à qui l'on offrait un éclairage flatteur (ces mêmes peintures, indice qui tend à m'encourager dans la comparaison, qui sont aujourd'hui présentées pour leur intérêt dans l'histoire de la mode). C'est un art dans la droite lignée de ce que faisaient Vigée-Lebrun ou Marie Laurencin (artiste que la critique masculine jugeait d'une "sensibilité d'apparence facile sans nette évolution", ce qui me fait penser à ce que l'on dit d'Elizabeth Peyton).
On pourrait considérer que le travail de l'artiste est donc essentiellement de la peinture de portrait de salon XIXe, avec un glacis plus moderne.

Quand à ce côté "girl art"romantique, il me semble qu'il fait partie de ces héritages féminins que nous avons toutes reçues inconsciemment, comme ce que j'appelle la "bibliothèque féminine oubliée", c'est à dire les Austen, Delly, Brontë, Chow Ching Lie, George Sand... qui se passaient de mère en fille, en propageant une certaine idée de la féminité. Le romantisme, le romanesque est une question de littérature (qu'on se rappelle les lectures romanesques d'Emma Bovary chez Flaubert**), mais également une question d'image : celle que propageait les magazines pour jeunes femmes de la beauté, de l'amour, de l'histoire. Et à ce titre, il ne me paraît pas anodin que la première exposition de Mrs Peyton, au Chelsea Hotel, aie essentiellement présenté des personnages historiques. C'est à cet imaginaire-là qu'elle se raccroche, elle en est l'héritière, je peux la rêver en victime de ses lectures.
Le choix de l'intervenante (Loué soit le Centre Pompidou de nous donner accés à cette passionante ressource), de lier ce qu'elle appelle "l'hystérie" de Mrs. Peyton à un roman (I love Dick, de Chris Kraus, qui paraît ce mois-ci chez Flammarion) dont le sujet principal est l'illusion obsessionelle de l'amour, est bien trouvé : en effet, en tant que femme, c'est bien le même type de fantasme qu'Elizabeth Peyton matérialise sur la toile, le même type de fantasme qui lui fait représenter une scène de Twillight, plus tard dans sa carrière.

A ce stade, ses efforts pour trouver des références artistiques viables en interview (comme Hockney qu'elle semble avoir saisi au vol et dont elle s'inspire), ou acquiécer à toute proposition de l'intervieweur sont une façon pathétique d'acheter une crédibilité auprès du monde de l'art : son oeuvre, me semble-t-il, trouve son explication dans un tout autre type d'imprégnation culturelle (et cela ne la disqualifie absolument pas à mes yeux). Tout ce discours auquel, en temps que femmes, nous sommes exposées, et que son art rend visible.

Ceci n'explique certes pas comment présenter Mrs. Peyton dans un musée d'art contemporain à côté des artistes conceptuels, mais il me semble qu'au titre de membre de la longue lignée des peintres obsessionnels aux prises avec un imaginaire trés défini (et élargissons le débat, citons Odilon Redon), son oeuvre présente un intérêt singulier.
Pour conclure, cette rapide incursion du côté féminin est l'occasion parfaite pour aller se plonger dans l'oeuvre de Sophie Calle et Louise Bourgeois. Pour rester dans l'art figuratif, on peut aller admirer le travail très similaire à celui d'Elizabeth Peyton de l'artiste Hope Gangloff, et approfondir ce qu'on connaît du travail de Marie Laurencin.



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* Dans lequel Flaubert nous dépeint une Emma incapable d'esprit critique face à ses lectures romantiques, qui causeront selon lui sa perte.

vendredi 22 juillet 2016

Choses vues et lues, juin-juillet 2016

Du bazar.
Et de l'action :
-Parfois, on se laisse impressionner par les choses que l'on ne connaît pas, uniquement parce qu'on est incapable de se représenter mentalement leur construction. Voir faire un dessin, par exemple, lorsque l'on regarde une vidéo Youtube, semble plus facile qu'être face à la feuille blanche avec son crayon. On peut alors se glisser dans les pas de la personne que l'on observe et mieux comprendre "comment c'est fait".

Longtemps, la photographie m'a semblé un art inaccessible et incompréhensible. Il m'a fallu la démonstration des techniques de réalisation de l'image dans un atelier pour enfin comprendre (la lumière, les négatifs et positifs).
Et se trouver capable de ramener la chose à sa technicité joyeuse pour produire des images, à son petit niveau.

- Parfois, on se laisse impressionner par des choses que l'on ne connaît pas (bis), parce qu'on les pare d'une telle valeur culturelle ajoutée qu'elle nous étouffe et nous empêche de nous y intéresser. Dans ce cas, rencontrer des passionnés qui vont partager avec vous ce qui les fait vibrer est une manière d'entrer à son tour dans le domaine. Dans mon cas, j'ai eu la chance d'assister à une formation cinéma d'une telle qualité qu'elle m'a rendue cinéphile et vaguement obsessionelle, ce qui fait que je regarde des films, et que je vais à d'absconses conférences tenues par des universitaires ayant des compulsions langagières portant sur l'adjectif "humoral" (à voir sur cette mine qu'est le site du Forum des Images). Et je me suis bien amusée en regardant des Chroma. Je n'ai plus peur, pas même de la Nouvelle Vague, pas même de Lussas (même si c'est pas pour cette année).

- Parfois on se laisse impressionner... Non, en fait, on n'a pas l'idée de faire le truc utile, et c'est quelqu'un d'autre qui allume la mèche à votre place : on m'a donc suggéré de faire un dessin par jour. Super bonne idée! Je m'y tiens depuis, de la répétition naît la progression (et on voit ça , on est invité à rigoler avec moi).
Cela me fait toutes sortes de bien parmi lesquels : s'obliger au croquis (la liaison main-oeil), terminer un dessin et sa mise en couleur (une de mes grosses angoisses, j'ai l'impression que je n'y comprends rien, à la couleur), tester des techniques différentes (enfin du sec, parce que jusqu'à maintenant je n'ai pas le temps de bricoler de l'aquarelle ou de la gouache le soir tard), trouver des sujets à dessiner (une réflexion barbare sur la pauvreté de mon imaginaire est en cours, je n'ai pas envie de dessiner de charmants quais Parisiens ou des jolies filles en jolies robes toute ma vie, ça m'ennuie, il va donc falloir trouver autre chose).

Et sinon :
 
Chris Ware : la bande dessinée réinventée, Jacques Samson et Benoît Peeters, Les impressions nouvelles, 2010.


Lire du Chris Ware, qu'on aie ou pas l'habitude de la bande dessinée, peut s'avérer un peu déroutant. La narration (quand figurent des phylactères et des paroles échangées, ce n'est pas toujours le cas) est inhabituelle, réduite à un symbole qu'il faut décrypter, le sens de lecture est aléatoire, les émotions des personnages se lisent dans la gradation subtile de leur mise en couleur, et l'objet-livre lui-même fait l'objet d'une déconstruction. Le lecteur un peu perdu, qui n'avait jamais rencontré de bande-dessinée post-moderne avant, se trouve bien content de fréquenter le livre mentionné ci-dessus, qui associe des textes présentant l'oeuvre de Chris Ware et ses influences, quelques articles de Chris Ware lui-même, et de nombreuses planches. On peut donc relire Jimmy Corrigan, Quimby the Mouse et le très spectaculaire Building stories (14 livrets rassemblés dans un coffret racontant les histoires séparées de personnes vivant dans le même bâtiment). En se trouvant tout ému, car Chris Ware, on le pressentait dans ses bandes dessinées, mais c'est évident en entretien, est un être humain sensible et bienveillant.



La fabrique du monstre : 10 ans d'immersion dans les quartiers Nord de Marseille, Philippe Pujol, Les Arènes, 2016.

Un nouveau livre de David Simon a été traduit par les éditions Inculte, et c'est alléchant, mais plus près de chez nous, qu'écrit un journaliste sur la drogue et les quartiers pauvres ? Qu'écrit le récipiendaire du Prix Albert Londres ? Philippe Pujol, ancien journaliste localier à La Marseillaise, raconte, et si le résultat n'est pas comparable à la narration brillante de l'auteur de The Wire, les situations dont il a été le témoin sont frappantes, et forment un rapport alarmant et douloureux sur la ville.
On en aura un résumé en écoutant cette émission.
Il va falloir lire Albert Londres.



Truman Capote, réalisation Benett Miller, 2005. Avec Philipp Seymour Hoffman, Catherine Keener...


Truman Capote, joli snob roi des conversations mondaines New yorkaises, s'est soudain pris de passion pour un meurtre familial au fin fond de l'Arkansas, essayant à force d'entretiens avec les meurtriers de comprendre la genèse de l'acte, dont il tirera son célèbre De sang froid. Le film montre ce jeu de manipulation auquel se livrent Capote et les détenus, l'un ayant le pouvoir (la liberté, l'argent, et surtout la parole), les autres ayant l'histoire dont il a besoin. Et comme il s'agit de relations humaines, de vie, et de mort, bien plus est finalement en jeu.
En parallèle du livre, j'ai aussi sur ma table de chevet Un plaisir trop bref, correspondance de Capote parfaite, qui associe brio, petits commérages et attentions touchantes. La quintessence des mots qu'on amerait avoir pour nos proches (impressionante traduction de Jacques Tournier), avec une vue imprenable sur le travail de l'auteur en train de se faire.
Et en parlant de la vie de Capote, je suis aussi curieuse de l'adaptation haute en couleurs et pas toujours du meilleur goût réalisée par Douglas McWrath en 2006, avec Toby Jones dans le rôle : Scandaleusement célèbre (Infamous).

Whity, R.W. Fassbinder, 1971
A la fin du XIXe siècle, dans une grande plantation du Sud des Etats-Unis, Whity est le fils illégitime d'un propriétaire blanc et d'une esclave noire. Tout en ayant un statut de serviteur, et en se laissant jouer par sa demi-famille blanche, il s'illusionne sur sa place dans cette famille très fin-de-race, parcourue de perversions et de haines quand lui est encore bon. C'est sa beauté et sa pureté que sa famille blanche lui envie tant, et qu'elle s'acharne à corrompre, tout en cherchant à en jouir. Ce cadre symbolique une fois posé, l'histoire se déroule sans accroc jusqu'aux scènes finales, prédestinées, où le héros se libère de ses entraves familiales.
Le film, et les couleurs, sont superbes (je pense notamment à la mise en valeur constante de la sensualité des personnages, par le vêtement -la veste rouge de Whity, les éclairages, les cadrages - un phénoménal plan tournant du héros, immobile sur son lit, et le jeu du maquillage, plus ou moins présent).


Lili Marleen, R. W Fassbinder, 1981
La très légère chanteuse de cabaret Lili Marleen entretient une relation avec un fils de banquier Suisse, fortement désapprouvée par la famille de celui-ci. Alors que la seconde guerre mondiale débute, la chanteuse aboandonnée se retrouve propulsée idole Hitlérienne à cause du succès de sa chanson, pendant que son amant, membre d'une organisation secrète de protection des juifs, se retrouve menacé. De cette trajectoire d'amour contrarié, Fassbinder tire des scènes mémorables, en jouant avec l'inquiétant glamour de cette vedette malgré elle, qui ne veut qu'une seule chose : son amour, et qu'elle n'obtiendra pas (et la scènes finale est paradoxalement très philosophe, car si la chanteuse est rejetée du monde rangé auquel elle aspirait, il est aussi évident que d'autres aventures l'attendent).


Et clore avec de l'art : suite à une géniale visiste chez Aaapoum-bapoum, je suis ultra-fan de l'auteur de bandes dessinées Chantal Montellier, de sa sobriété et de ses mises en couleur frappantes. Je vais en lire plus, je ferais un article un jour. Mais son dessin et son audace m'éblouissent.
Les damnés de Nanterre, Chantal Montellier, 2005







mercredi 13 juillet 2016

La justice de l'ancillaire, Ann Leckie

Hey.
Un petit mot rapide pour parler de ce livre sur lequel les avis semblent diverger, mais qui m'a plutôt enthousiasmé.

Donc, La Justice de l'ancillaire, traduit de Ancillary Justice, premier roman d'Ann Leckie, qui remercie dans son bouquin son club d'écriture, et partie inaugurale d'une trilogie dont le tome 2 vient juste de sortir (mais là, je suis noyée sous les bouquins, je me le garde donc comme plaisir coupable pour une prochaine fois).



Ce roman a reçu un accueil enthousiaste, dont le bandeau et la quatrième de couverture de l'édition J'ai Lu Millénaire porte la trace : une dizaine de mentions de prix parmi les plus prestigieux.
Pour autant, lorsqu'ayant loupé 3-4 stations de métro, prolongé une veillée de manière déraisonnable et jailli dans ma librairie préférée en le brandissant comme une sorcière son balai, le trio de spécialistes de la SF réuni à ce moment là devant le café m'a dit en gros : "Ah oui ? Tu as aimé ? Parce que bof-bof."
Bof-bof signifiant, parce que j'ai demandé : rien de nouveau sous le soleil, histoire ni originale ni intéressante, très longue première moitié du roman, personnages pas spécifiquement attachants.
Et puis j'ai lu d'autres critiques plutôt cools qui disaient "moui, ça peut plaire aux plus jeunes."

Well, il se trouve que j'ai vraiment aimé ma lecture, alors je vais essayer d'expliquer ce qui moi, m'a accroché : tout d'abord, il y a ce personnage principal incroyable (et effectivement peut-être pas follement chaleureux) qui est une intelligence artificielle de vaisseau spacial prise au piège dans un corps humain. Et qui regarde donc le monde avec une distance froide fascinante. Dès la première page, elle découvre une ancienne co-équipière dans une situation critique, et résoud de la sauver, pour des raisons particulièrement mystérieuses. Ce second personnage est délicieusement odieux, et c'est aussi lui qui va le plus évoluer pendant l'aventure, apportant progressivement une touche plus humaine (mais presque décevante, je l'aimais tellement snob, drogué et revenu de tout). Quoiqu'on ne puisse pas dire que notre IA reste complètement impassible, mais elle l'est pendant la majeure partie du récit, se révélant subtilement.
Comme les romans le font beaucoup, la narration alterne différentes périodes de temps: lorsque notre IA était encore un vaisseau, ses missions diplomatiques et ses relations avec son Capitaine préféré, et ses aventures actuelles. Bien sûr, et c'est pour moi l'une des meilleures pages du roman, Ann Leckie s'est réservée le plaisir de nous raconter la séparation de l'IA (une même scène d'action qui saute du vaisseau à la vingtaine de corps que son intelligence occupe, avec fluidité jusqu'à la rupture et l'isolement de notre héros). C'est, il me semble du très beau travail, et Ann Leckie est également plutôt douée pour le suspens (des scènes d'espionnage ou de négotiation très prenantes) et l'émotion.

Et surtout, il y a aussi ce jeu sur le genre qui m'a épatée (et je sais que c'est loin d'être la seule à jouer cette carte-là, et j'espère vite les découvrir) :  notre IA le dit dès le début, dans sa culture, il n'y a pas de différence culturelle entre les sexes, et le neutre est féminin. On dit par défaut "Une homme, Une capitaine, une vaisseau." L'ancienne partenaire récupérée à la page 1 est donc d'un genre indéterminée au début, à moins que le lecteur, comme moi, n'assume qu'elle est féminine pour finir par hésiter. Les relations entre personnages sont aussi habitées par cette incertitude, que l'on trouve troublante au début, pour l'accepter parfaitement en cours de roman.

Alors oui, c'est peut-être un peu facile par moment, comme un fast-food quand on rentre très tard chez soi et qu'on a pas envie de faire d'efforts. Mais le plaisir de lecture est bien présent, et pour peu qu'il soit disponible à la bibliothèque, ça vaut le coup d'essayer.

(Et ne me jetez pas trop de pierres, je vais lire du Baxter, c'est en cours...)
 

Materialists, Celine Song

Materialists est le second film de Celine Song, après Past Lives (2023), qui avait été très apprécié (je ne l'ai pas vu), et s'int...